RESUME de la PREDICATION du pasteur Bernard SAUVAGNAT du 5 mai 2018

Le gérant avisé (Luc 16.1-12)

C’est sans doute l’histoire la plus surprenante de toutes celles que Jésus a racontées.

A première vue, Jésus fait l’éloge d’un comportement malhonnête. Est-ce vraiment le cas ? Est-ce cohérent avec l’ensemble de son enseignement ? Je vous propose d’y réfléchir ensemble.

Dans cette histoire Jésus met en scène quatre personnes : le riche, le gérant employé et deux débiteurs. Tous ces personnages vivent du commerce des denrées agricoles.

. Le riche est sans doute le propriétaire de terres agricoles.

. De plus, il a investi dans ce commerce, mais emploie un gérant pour faire le travail commercial.

. Les deux débiteurs sont des agriculteurs, probablement des métayers qui travaillent la terre du propriétaire ou qui transforment les productions. L’un fait de l’huile avec les olives produites, l’autre récolte du blé.

Mais le personnage central est le gérant.

Dès le début du récit, ce gérant est accusé de dilapider les biens du riche propriétaire. Comment le fait-il ? Le texte ne le dit pas.

Que cette accusation soit fondée ou non, le propriétaire a décidé de le licencier. Cela veut dire qu’il ne peut plus lui faire confiance. Ce gérant ne se voit pas travailler la terre, Ce serait trop pénible pour ses forces physiques limitées. Il ne se sent pas non plus de mendier, car ce serait une honte pour lui. Alors il a une idée : il va réduire les dettes des débiteurs de son maître. Le texte qualifie ce gérant de trompeur, mais habile. Et c’est cette dernière qualité dont le maître fait l’éloge. Est-il trompeur dans cette dernière action ou l’était-il déjà avant ? Est-ce ce qui justifie l’accusation portée contre lui ?

On pourrait s’arrêter là, et dire simplement que, dans cette histoire, Jésus ne dit pas qu’il faut imiter le caractère trompeur de ce gérant, mais simplement son habileté.

Pourtant, on peut être plus précis concernant cette histoire. En effet, toutes les professions qui avaient à faire avec l’argent, ne fonctionnaient pas à l’époque et dans cette société comme elles le font aujourd’hui. Les gérants ne recevaient pas de salaire. Il était convenu qu’ils pouvaient prendre un pourcentage sur les bénéfices réalisés comme rémunération. Ainsi tant qu’un gérant prenait une part raisonnable du chiffre d’affaires, tout se passait convenablement. Mais, dès qu’il profitait de ce flou pour exploiter les fournisseurs et les clients de son patron, il était suspecté de voler les uns comme les autres.  Et cela pouvait aller jusqu’à la perte de la clientèle et donc la ruine du propriétaire de l’affaire. C’est peut-être ce qui justifiait l’accusation portée contre lui au début.

Il est donc tout à fait possible que les réductions que ce gérant accorde pour préparer son avenir ne soient finalement que le rétablissement des sommes réellement dues à son maître, voire même le renoncement total à son revenu légitime pour se faire des amis qui pourraient ensuite lui trouver un nouvel emploi puisqu’il va perdre le sien.

Et si cette histoire est lue de cette façon, alors Jésus félicite l’habileté de ce gérant parce qu’il a compris qu’en renonçant à des avantages immédiats il prépare son avenir. Et cet avenir dépend des amitiés qu’il crée ou renforce par ce renoncement. Il est alors très facile de comprendre qu’il ne faut pas considérer l’argent d’abord comme un moyen d’enrichissement, mais comme un moyen de créer et de renforcer des amitiés. Car, et c’est incontestable, le bonheur d’une vie dépend bien plus de la qualité des relations que l’on crée que de l’énormité de l’argent accumulé.